Libellés

ECRITURE (60) EVENEMENTS/NEWS (17) HONORINE (36) PHOTOS (24) POEMES (12)

dimanche 15 décembre 2019

Je m'interroge sur la grève

Comme tout le monde, j'en pâtis, surtout depuis que je suis à 50 km de Paris.
Quand j'y habitais, dans Paris, je trouvais cela amusant cette ville qui tout d'un coup se vidait ou au contraire était encore plus paralysée, car de toutes les façons, je me suis toujours déplacée à bicyclette. La banlieue, je savais vaguement que ça existait, mais rarement je traversais le périf, sauf pour aller en vacances, ce qui donnait lieu à des engueulades dans la voiture car à chaque fois on se trompait de sortie, on avait alors l'impression que l'on arriverait jamais à sortir de cette ville si bien encerclée, et c'était aussi le moment que choisissait le chat pour vomir... Ou alors je le franchissais pour prendre des photos de ces endroits si exotiques et pittoresques, et je m'étonnais que le simple fait de traverser le périf donne à voir des paysages si différents.

Apres, à la campagne, où j'ai passé 10 ans, les grèves n'étaient que des rumeurs lointaines, car là bas de toutes les façons on est loin de tout, et c'est d'ailleurs en habitant en province qu'on prend vraiment conscience que la France n'est centrée que sur Paris.

La SNCF qui est censée être un service public, n'en a pas l'air le moins du monde. C'est cher, tout le temps en retard, et tellement fragile que le moindre petit incident crée un nombre problèmes et d'annulations hors de proportion.

Maintenant que je prends le train parfois pour aller à Paris, je plains les gens qui doivent le prendre tous les jours. Les horaires changent d'un site internet à l'autre, et une fois sur deux le train est annulé au dernier moment. Un matin tôt à la gare de mon village, une dame m'a dit que le train que nous attendions et qui n'arrivait pas étais si souvent annulé qu'elle était sûre que le conducteur avait des pannes de réveil. Je comprends parfaitement les gens qui préfèrent rester dans les encombrements bien au chaud dans leur voiture à écouter la radio, plutôt que d'attendre un hypothétique train sur un quai où il n'y a souvent pas d'abri, et où, surgissant de nulle part une voix très claire et parfaitement audible, comme celle d'un dieu tout puissant et bienveillant assis au chaud dans un nuage, vous prévient de temps à autre de l'état de la circulation et du nombre de minutes que vous aurez encore à vous geler les fesses avant le prochain train. Parfois aussi, 2 ou 3 jeunes gens invariablement en survêt-baskets fument tranquillement des pétards, et vous avez bien envie de leur en demander une taffe.
Ça c'est quand il n'y a pas de grève.
Mais quand il y a: le 1er jour, ok, on reste chez soi bien tranquille. Le second on essaie de bouger car le patron au boulot, ne va pas vous permettre de sécher indéfiniment. On peut imaginer la galère pour se rendre sur son lieu de travail. Pour ceux sans patron, idem, on ne va pas tout arrêter, alors on prend sa bagnole, ou on repère le peu de trains qui circulent, et on y va coûte que coûte, sur son chantier, à ses rendez vous, en mettant 1 ou 2 heures de plus, tant pis.

La grève, ça emmerde surtout le français lambda, celui là même qu'elle est censée défendre. Et je crois que celui ci n’incrimine même pas le gouvernement car cette entité est bien trop lointaine, mais plutôt le conducteur de train, celui qui n'entend pas son réveil, ou "la SNCF " en général, puisque c'est à elle qu'on paie une petite fortune son pass-navigo ou son billet de TGV.
En revanche, ce qui est sûr, c'est que personne n'est content, et que pour un gouvernement, que personne ne soit content ce n'est pas top.

Au début de l'ère industrielle, d'accord, les grèves étaient nécessaires car les ouvriers étaient sous payés et mal traités, et si le patron en pâtissait les ouvriers aussi.Ils risquaient leur job en faisant la grève, n’étaient plus payés et crevaient encore plus la dalle. La grève à notre époque et dans notre pays même si les revendications sont légitimes, me semblent la continuation d'une "tradition" qui a beaucoup moins de sens qu'avant.

Je n'ai pas d'autres solutions pour que les gens puissent se faire entendre, -et le "pouvoir" qu'ils ont de paralyser tout un pays, sans risque pour leur petite personne est tentant- sauf des actions parfaitement répréhensibles mais à la mesure de celles que l'on subit en supportant cette grève et en général ceratins disfonctionnement des services publics: Crever les peneus de  toutes les voitures de fonction , assiéger les ministères et ne leur donner à manger que les "plateaux repas" si on peut appeler ça comme ça, que j'ai eu un soir le privilège de goûter lors du blocage d'un train pendant  toute une nuit,  couper les arrivées d'électricité pour qu'ils se gèlent un peu, ou leur envoyer quelques bugs informatiques qui les empêchent de travailler pendant un moment  ...
Pour ma part, je refuse de payer le train de banlieue, et je prends ainsi quelques risques.

Tout cela pour dire qu'il est très difficile de se mettre à la place des gens et que la pure imagination ne suffit pas à prendre la vraie mesure d'un problème. Un jour, j'avais un billet de TGV sans place attribuée. Sur le quai, à Bordeaux, je croise le contrôleur, et je lui demande si il reste une place : Il me dit que non. Puis arrive le conducteur du train qui me propose de voyager dans sa cabine, ce que j'accepte, plutôt que d'être debout dans un wagon. Je me suis alors retrouvée assise sur un siège étroit et très haut à côté de lui, sans repose pieds ni accoudoir, absolument inconfortable. Le type en revanche était ravi de pouvoir parler avec quelqu'un car depuis quelques années, il n'avait plus de co-pilote, et les trajets sont très longs surtout vers Tarbes où le TGV se transforme en tortillard. On ne peut pas dire qu'il "conduise" le train à proprement parler, mais il ne doit pas relâcher la pression de la barre sur le "volant" devant lui, sinon un système d'alarme se met en marche, une forte vibration et un son, si je me souviens bien. Donc il "n'agit" pas vraiment, Il doit juste ne pas "lâcher" quelque chose, ce qui est plutôt l'inverse d'une action, et n'aide pas à rester éveillé en ayant l'impression de faire quelque chose d'utile. Ce doit être assez pénible. A un moment, j'ai eu envie d'aller aux toilettes: et bien il n'y en a pas. Le conducteur me dit d'aller là derrière, où est le moteur: c'est un endroit où le plancher est en caillebottis à travers lequel je vois le sol défiler. C'est donc là que je fais pipi, accroupie, à travers ce grillage. De retour dans la cabine, je lui demande comment il fait puisqu'il est tout seul et ne peut pas lâcher son volant: il me montre une bouteille en plastique.
Arrivée à Tarbes, je connaissais tout de sa vie, et j'étais bien contente d'enfin pouvoir poser mes pieds par terre après avoir été suspendue sur ce siège pendant des heures…..